SVT - Première S
Chapitre 2.1
Du fixisme au mobilisme
 
OBJECTIF

        
TP1. Vitesse des ondes dans divers milieux
I. 1912 : la naissance de l'idée d'une mobilité horizontale des continents

A. Des similitudes entre continents
B. Les arguments en faveur d'une dérive des continents
L'essentiel

II. Années 1920 : le rejet de la dérive des continents

        TP2. La mesure de la vitesse des ondes P et ses enseignements
A. La sismologie montre que la Terre est solide
B. Des forces de dérive insuffisantes
C. Les raisons du refus
L'essentiel

       TP 3 (idée). La topograhie océanique
III. Années 1960 : des données nouvelles valident l'hypothèse d'une expansion océanique

A. La cartographie des fonds océaniques
B. Flux de chaleur et mouvements de convection manteliques
C. Le magnétisme terrestre : la clé du problème
L'essentiel

BILAN
 
La surface de la Terre telle qu'on la représente aujourd'hui
La surface terrestre est divisée en plaques qui ont des mouvements horizontaux. Cela entraîne un déplacement des terres émergées au cours du temps. On distingue 3 types de mouvements relatifs : la convergence (flèches blanches), la divergence (flèches rouges) et le coulissage (flèches noires). Sur la figure, la taille des flèches est proportionnelle à la vitesse de déplacement des plaques qui peut varier de 1 à 20 cm/an.
Image (modifiée) : www2.ulg.ac.be D'après Pomerol et al (2000)
 
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1 L'origine de la Terre telle qu'on la représentait en 1925 - 2 De la prune au pruneau - 3 La Terre ridée
Au XIX e siècle deux grands idées gouvernaient les sciences de la Terre.
- D'une part on pensait que l'intérieur de la Terre était en fusion et se refroidissait lentement. Ce refroidissement aurait donc entraîné une diminution de volume. Or la Terre a une surface constante car sa température, qui dépend de la distance au Soleil, est elle même constante. Il en résulte une Terre ridée (1) comme un fruit déshydraté (2). La surface terrestre est donc principalement affectée de mouvements verticaux. Les bassins océaniques sont des zones d'affaissement qui séparent des zones restées émergées, les continents (Suess 1888, lui parlait de pomme et non de pruneau).
- D'autre part les continents ont une position permanente au cours du temps, seuls des mouvements verticaux sont envisagés.
Si la première idée fut abandonnée dans les dernières années du XIXe siècle avec la découverte de la radioactivité (phénomène qui génère de la chaleur) il n'en est pas de même de la seconde.
Images : 1 et 3 (modifiées) livre de Géologie de classe de 4e, V. BOULET, 1925 planet-terre.ens-lyon.fr - 2 lapruneblogueuse.blogspot.fr et www.lesfruitsdesophia.fr
     
OBJECTIF

Alors qu'au début du XXe siècle on pensait que la position des continents était restée fixe depuis la formation de la Terre, on estime aujourd'hui que la partie externe de la Terre est formée de plaques qui se déplacent horizontalement, et en permanence, les unes par rapport aux autres.

En s'appuyant sur une démarche historique on cherche à comprendre comment les scientifiques sont passés d'une conception " fixiste " à une conception " mobiliste " de la surface de la Terre.
   

TP1. Vitesse des ondes dans divers milieux (ce TP peut être placé avant l'introduction ou après le I).

I. 1912 : la naissance de l'idée d'une mobilité horizontale des continents
I.A. Des similitudes entre continents
 
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1 Prolongement en Amérique du Nord des chaînes européennes (Marcel Bertrand 1887) - 2 Concordances géologiques entre l'Afrique et l'Amérique du Sud (Alexandre Du Toit 1927, partisan de Wegener)
Les chaînes européennes (chaînes calédonienne, hercynienne et alpine) se prolongent sur le continent américain (1). Il en est de même entre l'Afrique et l'Amérique du Sud pour les boucliers anciens (2). Selon le modèle explicatif fixiste, l'affaissement qui a conduit à la formation de l'océan Atlantique a coupé les structures montagneuses des continents qui le bordent à angle droit.
Images : 1 D'après Marcel Bertrand La chaîne des Alpes et la formation du continent européen, Bull. Soc. Géol. Fr., 3e série, 15, 1887, p.442 - 2 (modifiée) Alain Gallien svt.ac-dijon.fr
 
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1 Des fossiles communs d'un continent à l'autre (Sclater 1864) - 2 Les anciens continents à la période secondaire (Émile Haug 1900)
Mesosaurus : petit reptile d'eau douce - Cynognathus : reptile prédateur terrestre - Lystrosaurus : reptile terrestre - Glossopteris : plante terrestre
Des régions aujourd'hui séparées par des océans possédaient une faune fossile commune il y a 240 Ma (1). Si ces espèces avaient pu traverser les océans, on les retrouverait dans le monde entier. Selon le modèle explicatif fixiste les continents actuels étaient autrefois reliés par des ponts continentaux permettant le libre passage des organismes (2), d'autres auteurs dessinent des ponts continentaux plus étroits. Leur effondrement a conduit à un isolement génétique (voir cours de seconde chapitre 1.4 ) qui a provoqué la divergence des espèces que l'on connaît aujourd'hui.
Images : 1 (modifiée) : Alain Gallien svt.ac-dijon.fr - 2 Émile Haug Les géosynclinaux et les aires continentales, Bull. Soc. Géol. Fr., 3e série, 28, 1900, p.633
 
Le mythe de l'Atlantide
Au tout début du 20e siècle ...
● Le modèle fixiste est une représentation de base, largement admise et qui n'a pas besoin de démonstration (paradigme).
● Les fonds océaniques sont en grande partie inconnus car inaccessibles.
● L'idée d'isthmes ou de ponts continentaux qui auraient permis une continuité terrestre, aujourd'hui disparue suite à leur effondrement et à leur submersion, est une idée qui parait vraisemblable :
- les travaux de percement des isthmes intercontinentaux : Panama (1882-1914) et de Suez (1859-1869) sont dans toutes les mémoires ;
- le mythe de l'Atlantide, décrit par Platon (400 avant J. -C.) puis repris par Buffon au XVIIIe siècle, fait l'objet de publications.
Image : SVT 1S, Bordas 2011 p. 88
I.B. Les arguments en faveur d'une dérive des continents
 
Alfred Wegener (astronome et climatologue allemand 1880 - 1930)
Il
n'est pas le premier à supposer un déplacement horizontal des continents mais c'est le premier à accumuler des observations pour élaborer une théorie de la dérive des continents. Il présente son idée en 1912 puis la développe jusqu'en 1929 au cours d'éditions successives de son livre La genèse des continents et des océans.
Images : cs.wikipedia.org et de.wikisource.org A. Wegener, Die Entstehung der Kontinente und Ozeane, Braunschweig, F. Vieweg & Sohn, 1929

I.B.1. Concordance des structures géologiques
 
Concordances géologiques entre l'Afrique et l'Amérique du Sud (selon Wegener)
Le rassemblement des masses continentales permet d'expliquer la continuité des structures géologiques entre continents, aujourd'hui séparés par l'océan Atlantique. En particulier les deux petites zones de São Luis et de Salvador se rattachent respectivement aux boucliers ouest-africain et angolais. On observe aussi une continuité dans les directions des structures géologiques (pointillés).
Image (modifiée) : Alain Gallien svt.ac-dijon.fr
 
Correspondance des structures géologiques entre l'Amérique du Nord et l'Europe
Les trois chaînes de montagnes, Appalaches (Est de l'Amérique du Nord), Mauritanides (nord-est de l'Afrique) et Calédonides (Iles Britanniques, Scandinavie), aujourd'hui séparées par l'Océan Atlantique, ne forment qu'une seule chaîne continue si on rapproche les continents à la manière de Wegener. Ces trois chaînes ont des structures géologiques identiques et se sont formées en même temps entre 470 et 350 Ma.
Image : www2.ggl.ulaval.ca
I.B.2. Distribution géographique de certains fossiles
 
Distribution géographique de certains fossiles (selon Wegener)
Le rassemblement des masses continentales permet d'expliquer l'aire de répartition de certains fossiles sans faire appel aux ponts continentaux.
Images (modifiées) : Alain Gallien svt.ac-dijon.fr
I.B.3. Distribution géographique des paléoclimats (climats anciens)
 

Limite septentrionale et sens d'écoulement des glaciers au Carbonifère supérieur (- 250 Ma)
Il y a 250 Ma tous les continents de l'hémisphère Sud (et une partie de l'Inde), aujourd'hui très éloignés les uns des autres, étaient recouverts par des glaces, alors qu'aucun des continents situés actuellement dans l'hémisphère Nord (à part l'Inde) n'en possédait . Il est plus qu'improbable qu'il ait pu y avoir glaciation sur des continents se trouvant dans la zone tropicale (sud de l'Afrique, Inde). De plus, il est anormal que l'écoulement des glaces (flèches), se fasse vers l'intérieur d'un continent (des points bas vers les points hauts).
Image : www.ages.ulg.ac.be Hamblin et Christiansen, 1995 d'après A. Wegener
 
Distribution géographique des paléoclimats au Carbonifère supérieur (selon Wegener)
Le rassemblement des masses continentales permet d'expliquer ces dépôts glaciaires. Il permet aussi d'expliquer la répartition des traces actuelles des climats anciens (paléoclimats).
Image (modifiée) : www.ages.ulg.ac.be d'après A. Wegener
I.B.4. Concordance du tracé des des côtes
  Reconstitution paléogéographique (Wegener)
Comme d'autres, Wegener constate que les contours des continents sont complémentaires (comme les pièces d'un puzzle). Il en déduit qu'ils proviennent de la fragmentation d'un continent unique, la Pangée (1), qu'il situe au Carbonifère (- 270 Ma).
Image (modifiée) : de.wikipedia.org
 
Concordance du tracé des côtes de l'océan Atlantique (représentation actuelle)
Un emboîtement correct n'est possible qu'à 900 m de profondeur ce qui était impossible à réaliser en 1912. Les zones en bleu clair représentent la surface des continents se situant entre le rivage (profondeur 0) et la profondeur de 900 m ; en noir, les zones où il y a recouvrement des masses continentales et, en blanc, les zones laissées vides (la largeur moyenne de ces zones n'excède pas 100 km).
Image : www2.ggl.ulaval.ca d'après Edward Bullard, J. Everett et A. Smith au début des années 1960

I.B.5. Océans et continents
 
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1 Distribution des altitudes sur Terre (courbe hypsométrique, Krümmel 1897) - 2 Courbe de fréquence des altitudes sur Terre (Wegener)
Deux niveaux d'altitudes sont nettement privilégiés (courbe en trait plein sur 2). Le premier, situé vers + 100 m, correspond à l'altitude la plus fréquente des continents, le second, situé vers - 4700 m correspond à la profondeur la plus fréquente des océans. Cette courbe de fréquence à deux sommets (bimodale) est en contradiction avec l'idée d'un affaissement océanique à partir d'un niveau initial commun aux océans et aux continents car on aurait alors une courbe avec un seul maximum (courbe en pointillé sur 2). Il y aurait donc eu deux niveaux initiaux, l'un océanique et l'autre continental formés de matériaux différents.
Images : 1 planet-terre.ens-lyon.fr - 2 planet-terre.ens-lyon.fr
 
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1 Une nouvelle conception hypothétique de la structure du globe - 2 L'iceberg B15 (image satellitale)
- Au début du 20e siècle, les continents sont considérés comme des blocs légers formés de sial (car composés essentiellement de silicium et d'aluminium) en équilibre sur une couche plus dense de sima (roches composées essentiellement de silicium et de magnésium).
- Dans le modèle fixiste les continents et les fonds océaniques sont constitués des mêmes matériaux (sial) "flottant" sur le sima. Des mouvements verticaux entraînent la distinction entre océan et continent, ce qui aboutit à une surface ridée et la surface des terres émergées a diminuée au cours du temps (1).
- Dans le modèle mobiliste de Wegener les continents constituent des figures permanentes à la surface du globe et le sima affleure dans les fonds océaniques (1). Le déplacement vertical (effondrement des ponts continentaux) est remplacé par un déplacement horizontal (dérive des continents) du sial solide sur le sima visqueux (déformable sur une longue durée). Pour Wegener "les continents et les sols sous-océaniques constituent deux couches distinctes de l'écorce terrestre qui se comportent (...) comme des icebergs tabulaires et l'eau qui les baigne" (2). En se déplaçant les continents engendrent à leur proue des bourrelets à l'origine des chaînes de montagne et perdent des guirlandes d'îles dans leur sillage.
Image 2 : fr.wikipedia.org - NASA/GSFC/Robert Bindschadler
 
I. Années 1910 : la naissance de l'idée d'une mobilité horizontale des continents

Depuis l'Antiquité il est admis que les continents ont toujours existé dans leurs positions actuelles. Au début du XXe siècle la plupart des géologues pensent que les océans sont la conséquence de l'affaissement de la surface continentale et que les chaînes de montagnes résultent, elles aussi, de mouvements principalement verticaux. Ce modèle explicatif fixiste permet de rendre compte des faits observés en milieu continental (les océans étant inaccessibles).

Les premières idées évoquant la mobilité horizontale s’appuient sur quelques constatations.

- La concordance du tracé des côtes (de part et d'autre de l'océan Atlantique notamment) suggère qu'elles proviennent de la fragmentation d'un bloc continental unique.
- La distribution géographique des structures géologiques (chaînes de montagnes), des paléoclimats et de certains fossiles montre une continuité si on rassemble les continents comme le suggère le tracé des côtes.
 
« C'est comme si nous devions reconstituer une page de journal déchirée, en mettant les morceaux bord à bord, puis en vérifiant si les lignes imprimées correspondent. Si oui, ont doit conclure que les morceaux étaient bien placés de cette façon à l'origine .»
Alfred Wegener, la génèse des continents et des océans, 1912
- La distribution bimodale des altitudes montre que l'altitude moyenne des continents (environ 100 m) se distingue nettement de la profondeur moyenne des océans (environ - 4700 m). Cela révèle que les continents sont des structures permanentes et que les fonds océaniques sont de nature différente.
Un nouveau modèle explicatif

Ces observations conduisent Alfred Wegener à proposer l'hypothèse selon laquelle un supercontinent, la Pangée, se serait fragmenté entraînant une dérive des continents issus de cette fragmentation. Dans ce modèle les continents sont portés par une couche de nature différente (plus dense) qui constitue aussi les fonds océaniques et sur laquelle ils dérivent (comme des icebergs flottant sur l'eau qui les baigne).

   
II. Années 1920 : le rejet de la dérive des continents
II.A. La sismologie montre que la Terre est solide
II.A.1. La sismologie permet d'explorer la Terre interne
 
La Terre a un rayon de près de 6 500 km, mais aucune méthode ne permet de l'explorer directement à plus de 12 km. Pour connaître sa structure interne on utilise des méthodes indirectes, comme l'étude des séismes (tremblements de terre), qui permettent de l'ausculter (de l'écouter).
 
Les effets d'un séisme
Des roches soumises à des tensions croissantes se déforment d'abord de façon élastique, puis il y a rupture en un point, le foyer ou hypocentre. À partir de celui-ci se propagent des ondes sismiques (vibrations). Un rai sismique est une ligne perpendiculaire au front d'onde. L'épicentre est le point de la surface qui est situé à la verticale du foyer.
Image : depot.alpes-maritimes.pref.gouv.fr
 
Les ondes sismiques
Un sismographe enregistre les ondes sismiques (P, S et de surface) sous forme de sismogramme (B). Enregistrement réalisé en Allemagne lors du séisme survenu en Haïti le 12 janvier 2010 à 21 h 53 (heure GMT).
Image A : d'après SVT 1S, Bordas 1993 p. 306 Claude Allègre, Les fureurs de la Terre - B : SVT 1eS, Bordas 2011 p. 92

  Les ondes de volume
 
Les ondes P ou premières sont des ondes de compression-dilatation (modèle du ressort) qui se propagent en volume (qui traversent la Terre). Ce sont les ondes les plus rapides, qui se propagent dans tous les milieux. Leur vitesse croit avec la densité du milieu traversé.
 
Les ondes S ou secondes sont des ondes de cisaillement (modèle de la corde) qui se propagent aussi en volume, mais uniquement dans les solides (pas dans les liquides). Leur vitesse croit aussi avec la densité du milieu traversé mais elles sont plus lentes que les ondes P (elles arrivent en retard au point de réception). Le rapport de vitesse des ondes P et S est de 1,73 pour la Terre.
 
Les ondes de surface ne se propagent qu'en surface (modèle de la houle). Bien que les plus lentes, elles ont une grande amplitude et donc un grand effet destructeur.
Images : planet-terre.ens-lyon.fr
TP2. La mesure de la vitesse des ondes P et ses enseignements
II.A.2. Une discontinuité sépare la croûte du manteau (André Mohorovicic 1909)
 
Sismogrammes correspondant au tremblement de Terre du 8 octobre 1909 en Croatie
Le 8 octobre 1909, dans son laboratoire de Zagreb en Croatie, André Mohorovicic enregistre le sismogramme d'un séisme dont l'épicentre est à Pokupsko, une ville qui se situe à quelques dizaines de kilomètre au sud de Zagreb. Il se fait ensuite envoyer les enregistrements d'autres stations. Enanalyant les résultats, il observe deux trains successifs d'ondes P (ainsi de que deux trains successifs d'ondes S).
Image : www.gfz.hr
Des ondes Pn qui arrivent avant les ondes Pg
Séisme du 8 septembre 1995 à 16 h 46 min 57,649 s
La station OG08 (Isère, France), située à 58,6 km de l'épicentre, enregistre un sismogramme classique avec des ondes Pg. À la station SSB, (Bourg-Argental, Isère, France) située plus loin de l'épicentre (107 km), deux trains d'ondes P se succèdent, des ondes Pn précèdent les ondes Pg, elles sont donc plus rapides. On peut observer le même phénomène pour les ondes S (non visible sur l'image).
Source et autres exemples : www2.ac-lyon.fr - Image (modifiée) : traitement Sismolog
 
Exercice 1. Calcul de la vitesse des ondes P
En utilisant les données des sismogrammes ci-dessus (séisme du 8 septembre 1995) calculer la vitesse des ondes Pg pour chacune des deux stations OG08 et SSB. En déduire la vitesse moyenne des ondes P dans la croûte en Savoie (arrondir cette dernière valeur au centième).
Correction
 
André Mohorovicic
Mohorovicic fait le raisonnement suivant. Puisque les ondes Pg et Pn sont de même nature (ondes P de compression-dilatation) elles se propagent donc à la même vitesse. Puisque les ondes Pg et Pn partent en même temps (heure du séisme), qu'elles se propagent à la même vitesse et qu'elles n'arrivent pas en même temps, elles ont forcément traversé des milieux différents et ont donc emprunté des chemins différents.
Image : www.larousse.fr
 
Un rai sismique se comporte comme un rayon lumineux
Lors d'un changement de milieu de propagation un rai incident (P ou S) subit une réflexion, une réfraction accompagnée d'une variation de vitesse. Cela permet de révéler des discontinuités physiques dans les milieux traversés.
 
Interprétation des deux trains d'ondes P (Mohorovicic, 1909)
Les ondes Pg suivent un trajet direct. Les ondes Pn s'enfoncent dans la croûte (le sial à l'époque) et atteignent un milieu différent, le manteau (le sima à l'époque), de densité supérieure. Elles subissent alors une rélexion et une réfraction. Quand la somme de l'angle d'incidence et de l'angle de réflexion est égale à 90°(incidence limite) l'angle de réfraction est alors tel que le rai réfracté est parallèle à la surface. Les ondes réfractées accélèrent et, bien qu'elles aient un trajet plus long, doublent les ondes Pg si la distance de la station à l'épicentre est suffisante (station 5 par exemple). La discontinuité physique entre la croûte et le manteau est depuis appelée discontinuité de Mohorovicic ou Moho.
Des ondes PMP qui arrivent après les ondes Pg
Séisme du 19 janvier 1991 à 3 h 12 min 04,493 s
La station OG02 (Annemasse, Savoie, France) enregistre deux trains d'ondes P, des ondes Pg et des ondes PMP qui arrivent après. Les ondes PMP sont des ondes P réfléchies par le Moho.
Source et autres exemples : www2.ac-lyon.fr - Image (modifiée) : traitement Sismolog
 
Exercice 2. Calcul de la profondeur du Moho
En utilisant les données les sismogrammes ci-dessus (séisme du 19 janvier 1991) calculer la profondeur du Moho dans la région étudiée.
Profondeur focale h = 11 km ; Distance épicentrale Δ = 63,3 km ; Vitesse des ondes P dans cette région des Alpes V = 6,25 km.s-1.
Correction
 
Les ondes S se déplacent dans le manteau (seules les ondes directes sont ici représentées)
Comme les ondes P, les ondes S peuvent traverser le manteau. Puisque les ondes S ne se propagent que dans les solides, on peut en déduire que le manteau est à l'état solide.
Image (modifiée) : traitement Sismolog
 

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Une discontinuité à la base du manteau (Beno Gutenberg, 1912) 1 Modélisation informatique - 2 Modélisation laser (avec 2 cristallisoirs emboîtés)
Les ondes P émises par un séisme sont enregistrées normalement jusqu'à la distance épicentrale de 105°.Entre 105 et 142°, les ondes P ne sont plus observées, puis à 142°, elles réapparaissent. C'est le phénomène de zone d'ombre que Gutenberg explique comme le résultat de la réfraction des ondes P à travers une discontinuité marquant une chute brutale de la vitesse des ondes. La discontinuité physique entre manteau et noyau est appelée la discontinuité de Gutenberg et se situe à 2 900 km de profondeur, le manteau représente donc 84% du volume de la Terre. La discontinuité de Lehmann, située vers 5 100 km entre le noyau et la graine, a été découverte en 1936.
Image : 1 (modifiée) : traitement Sismolog - SVT 1S Bordas 2011 p. 95

II.B. Des forces de dérive insuffisantes
 
Les forces de dérive
Pour Wegener les continents solides se déplacent sur un manteau lui même solide. Cela suppose la mise en œuvre de forces énormes. Les forces de dérive proposées par Wegener sont toutes extérieures aux continents. La force centrifuge (liée à la rotation de la Terre) provoquerait une dérive des continents vers l'équateur et l'action combinée de la rotation de la Terre et des forces de marée (liées au système Soleil Lune) entraînerait une dérive des continents vers l'ouest.
 
- Comment expliquer que les forces de dérive ne s'exercent pas de la même manière sur tous les continents ? (ils n'ont pas le même itinéraire.)
- Comment les forces de dérive se sont-elles exercées avant le Carbonifère (-250 Ma) ? (Continents rassemblés dans l'hémisphère sud au carbonifère.)
- Comment expliquer alors que les forces de dérive aient changé de direction au cours du temps ?
II.C. Les raisons du refus
 
Des arguments contestés
L'originalité de la démarche de Wegener est de mettre en relation des données d'ordre général puisées dans de multiples disciplines. Face à lui les scientifiques sont tous des spécialistes de leur discipline qui ont l'habitude de travailler sur des mesures locales sans (oser) envisager une approche globale. Les arguments de Wegener sont systématiquement rejetés.
- Les forces de dérive sont insuffisantes pour permettre le déplacement de masses continentales solides sur un support lui même solide ou pour expliquer l'élévation des chaînes de montagne.
- Les ajustements de forme entre les continents apparaissent imprécis. Certains assurent qu'ils sont accidentels et n'hésitent pas à proposer d'autres assemblages géométriques qui, selon eux, sont tout aussi vraisemblables.
- Les continuités des structures géologiques entre les continents sont également remises en cause. Des exemples sont avancés où celles-ci ne sont pas vérifiées, sont manquantes ou même contradictoires.
- Les similitudes entres les faunes et les flores des continents disjoints ne sont pas niées mais on remarque qu'elles sont loin d'aller jusqu'à l'identité comme cela devrait être le cas si les continents avaient réellement été accolés.
Curieusement, les arguments paléoclimatiques ne sont jamais abordés par les contradicteurs de Wegener. Comment expliquer en effet au Carbonifère la présence de glaciers en Afrique (Namibie au sud de l'Afrique) et, à la même époque, de forêts équatoriales au Spitzberg (îles norvégiennes situées dans l'océan glacial Arctique) ?
 
Une hypothèse non validée
- Wegener montre qu'au Carbonifère les continents actuels n'en formaient qu'un seul. Or cela ne remet pas en cause la théorie fixiste qui affirme au fond la même chose (les continents actuels n'ont jamais changé de place, il étaient autrefois reliés par des ponts aujourd'hui effondrés).
- Wegener ne valide pas son hypothèse de la dérive des continents. Pour expliquer les phénomènes qu'il décrit, on pourrait tout aussi bien invoquer des scénarios catastrophistes (lien externe) qui, eux, ne remettent pas en cause le fixisme. Le déluge, par exemple, aurait pu provoquer l'effondrement du plancher de l'océan Atlantique.
 
« Si nous croyons l'hypothèse de Wegener, nous devons oublier tout ce que nous avons appris dans les soixante-dix dernières années et retourner sur les bancs de l'école. »
R. T. Chamberlin, Some of the objection to Wegener's Theory, in W. A. van Waterschoot van Der Gracht, Theory of continental drift : a symposium, Tulsa, American Asociation of the Petroleum Geologists, 1928, p.87.
     
II. Années 1920 : le rejet de la dérive des continents

Avec le XXe siècle débute véritablement la sismologie.
Les ondes sismiques
À la suite d'une fracture souterraine on observe la propagation d'ondes sismiques. Des plus rapides aux plus lentes on distingue principalement :
     - les ondes P ou premières qui sont des ondes de compression-dilatation (modèle du ressort) se propageant en volume (qui traversent la Terre) dans tous les milieux (solides ou liquides), leur vitesse croit avec la densité du milieu traversé ;
     - les ondes S ou secondes
sont des ondes de cisaillement (modèle de la corde) qui se propagent aussi en volume, mais uniquement dans les solides (pas dans les liquides),
leur vitesse croit avec la densité du milieu traversé ;
     - les ondes de surface qui sont les plus destructrices.
Les rais sismiques se réfléchissent et se réfractent quand ils changent de milieu de propagation (comme des rayons lumineux).

La sismologie permet d'explorer la Terre interne.
1. - L'étude des ondes P et S permet de distinguer la croûte, d'épaisseur variable, jusqu'à la discontinuité de Mohorovicic ou Moho. La croûte repose sur le manteau, plus dense (accélération des ondes P et S) qui de poursuit jusqu'à le discontinuité de Gutenberg à 2 900 km de profondeur.
2. La détection des ondes S (qui ne se propagent pas dans les liquides) montre que la croûte et le manteau sont à l'état solide, et non visqueux (comme le propose Wegener).
Trajets des ondes P

Non seulement les arguments de Wegener sont un à un contestés mais les forces de dérive qu'il propose s'avèrent très insuffisantes pour expliquer le déplacement d'une croûte solide sur un manteau lui-même solide. L’idée de mobilité horizontale est donc d'abord rejetée par la communauté scientifique.
   
TP 3 (idée). La topograhie océanique
Source eduterre.ens-lyon.fr
III. Années 1960 : des données nouvelles valident l'hypothèse d'une expansion océanique
 
Le navire océanographique Vema (Lamont-Doherty Earth Observatory - Université de Columbia)
Après la seconde guerre mondiale le développement des techniques de reconnaissance sous-marine (photographie sous-marine, échosondeur, sismique réflexion, détection magnétique...) a permis la découverte progressive des fonds marins qui représentent les deux tiers de la surface terrestre. Parmi les navires océanographiques de cette époque, le plus connu est le Vema (un ancien yacht) qui a sillonnée tous les océans du monde de 1953 à 1981.
Image : SVT 1S, Belin 2011 p. 80)
III.A. La cartographie des fonds océniques
 

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1 Sondeur acoustique - 2 Carte des fonds océaniques (1960) - 3 Dorsale de l'océan Atlantique - 4 Profil topographique dans l'océan Atlantique - 5 Profil topographique dans l'océan Pacifique - 6 Fosse du Pérou - 7 Plateau continental du golfe de Gascogne (dans 4 et 5 l' échelle verticale est très exagérée)
Dès les années 1940 les sondeurs acoustiques (1) permettent des relevés bathymétriques du fond des océans par mesure du temps de trajet d’un signal acoustique réfléchi par le fond*. En 1960 ont permis d’établir une carte du relief des fonds océaniques (2). On découvre (Tharp, Henzen et Ewing) qu'une dorsale (3) serpente dans tous les océans (4 et 5). Sur près de 65 000 km de long pour 500 à 2 000 km de large elle culmine vers 2,5 km de profondeur et domine les plaines abyssales dont la profondeur est d'environ 5 km. On découvre aussi la présence de fosses (6) qui forment un sillon, de 8 à 11 km de profondeur pour 100 km de large, principalement en bordure de l'océan Pacifique. En l'absence de fosse, la bordure immergée des continents forme un plateau continental (7) qui s'enfonce en pente douce. À partir de 200 m de profondeur environ la pente augmente rapidement et forme le talus continental qui rejoint la plaine abyssale.
Images :1 public.iutenligne.net - 2 www.earthinstitute.columbia.edu - 3 à 7 traitements Sismolog

 
* Les ondes sonores se déplacent dans l'eau à la vitesse d'environ 1500m/s (300 m/s dans l'air). Cette vitesse varie un peu en fonction de la densité de l’eau (c'est-à-dire en fonction de la température et de la salinité de l’eau). À partir de la surface on mesure donc le temps de trajet aller-retour d'une onde sonsore (secondes temps double).
III.B. Flux de chaleur et mouvements de convection manteliques
 
Lorsque la température d'un milieu n'est pas homogène, la chaleur peut être transportée des zones « chaudes » vers les zones « froides » par différents processus :
- la conduction , qui permet la diffusion de la chaleur à travers un milieu statique ;
- le rayonnement dans le cas d'un milieu transparent ;
- la convection, qui permet un transport de la chaleur par la matière elle-même en mouvement.
 
Les courants de convection dans le manteau (Arthur Holmes, géologue britanique, 1929)
À la fin du XIXe siècle on découvre la radioactivité de la Terre, or celle-ci génère des quantités énormes de chaleur qui doivent s'évacuer. Dès 1929, Holmes propose que des mouvements de convection dans le manteau solide puissent être le moteur de la dérive des continents. Il semble que Wegener, décédé en 1930, n'ait jamais eu connaissance de ces travaux.
Image : annales.org
 
Mesures du flux de chaleur terrestre en Watts par mètre carré (représentation actuelle - 1997)
Le flux géothermique est la quantité de chaleur d'origine interne évacuée par unité de surface et par unité de temps. Les premières mesures du flux géothermique (Bullard, Maxwell et Revele dans les années 1950) montrent :
- qu'il ne présente pas de différence marquée entre continents et océans ;
- qu'il est plus élevé que la moyenne au niveau des dorsales.
Image (modifiée) : peterbird.name
 
Les anomalies de gravité (représentation actuelle)
Les premières mesures sont réalisées par Vening-Meinesz dans les années 1940. Il lie notamment les anomalies de gravité positives à des excès de masse provoqués par la partie plongeante des cellules de convection.
Image : www.sciencesetavenir.fr
 
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1 Guyot dans l'océan Pacifique - 2 Interprétation de la formation des guyots (Harry Hess, géologue américain, 1960)
Lors de la seconde guerre mondiale, Hess sillonna le Pacifique comme officier de la marine. Entre deux missions militaires, il réalisa des relevés bathymétriques et découvrit ce qu'il appela des guyots (1). Il s'agit de guirlandes d'anciennes îles volcaniques, tronquées par l'érosion qui se sont ensuite enfoncées sous les eaux, parfois à de grandes profondeurs. En 1960 Harry Hess imagine que les îles volcaniques sont entraînées par le glissement du flanc (2) de la dorsale jusqu'à la plaine abyssale puis sont englouties au niveau des fosses. Ils ne publie ses travaux qu'en 1962 et les qualifie lui-même prudemment : "essai de géopoésie".
image : www.ucl.ac.uk - Source : La Recherche n° 153, mars 1984
 
Géométrie possible d'une cellule de convection du manteau (Harry Hess, 1960)
En 1960, Hess attribue (comme Holmes 30 ans plus tôt) la mobilité des fonds marins à des mouvements de convection affectant le manteau et considère que les dorsales sont la manifestation en surface des branches ascendantes de cellules de convection et que les fosses océaniques sont les témoins des branches descendantes. Les continents seraient entraînés passivement à la surface de ces cellules de convection.
Image : planet-terre.ens-lyon.fr
 
Glacier de la Mer de glace (massif du Mont-Blanc)
On admet aujourd'hui qu'un solide peut très bien se déformer comme l'attestent les glaciers. La glace est un solide visqueux (1016 fois plus visqueux que de l'eau à 20°C, mais 107 fois moins visqueux = plus « fluide ») que le manteau terrestre.
Image : fr.fotopedia.com
III.C. Le magnétisme terrestre : la clé du problème
 
Le champ magnétique terrestre
La Terre agit comme un aimant. Le champ magnétique terrestre est la conséquence d'écoulements de matière ionisée dans le noyau terrestre qui entraînent des courants électriques. Sa direction est indiquée par l'aiguille aimantée d'une boussole. La positon des pôles magnétiques varie en permanence mais leurs déplacements (qui peuvent atteindre 50 km en un an) se font toujours au sein d'une zone peu étendue, de sorte que les positions des pôles magnétiques sont considérées aujourd'hui comme des repères stables à l'échelle des temps géologiques.
 
Les roches peuvent enregistrer le champ magnétique "fossile"
Quand une roche fondue refroidit les minéraux ferromagnétiques qu'elle contient (comme la magnétite Fe3O4) s'aimantent vers 600°C (585°C pour la magnétite), c'est le point de Curie. Elle acquiert alors son propre champ magnétique parallèle au champ magnétique terrestre ambiant. Après refroidissement la roche solide possède alors une "mémoire" magnétique qui indique la direction des pôles magnétiques au moment de son refroidissement. C'est le paléomagnétisme.
Image : eduterre.ens-lyon.fr et eduterre.ens-lyon.fr
 
Mise en évidence du point de Curie
Pour un matériau ferromagnétique le point de Curie ou température de Curie (TC), est la température à partir de laquelle le matériau perd son aimantation spontanée. Cette transition est réversible car le matériau retrouve ses propriétés ferromagnétiques quand sa température redescend en dessous du point de Curie.
Vidéo : www.svt.ac-versailles.fr
 
La migration (apparente) des pôles (Keith Runcorn et Ted Irving, 1954)
Les roches anciennes indiquent des pôles différents des roches actuelles. À une époque donnée, les pôles ne coïncident pas d'un continent à l'autre. Cette observation peut être interprétée de deux manières : pour les fixistes la position des pôles a changé (A), pour les mobilistes ce sont les continents qui se sont déplacés et les pôles n'ont pas bougé (B) .
Image : tasaclips.com
 
Les inversions du champ magnétique terrestre (Brunhes et Matuyama, 1906)
En étudiant des superpositions de coulées de lave en milieu continental, on observe que le champ magnétique terrestre s'est inversé au cours du temps. Le Nord magnétique se trouve alors du côté du Sud géographique et inversement. On distingue donc des époques normales où le champ magnétique est identique à l'actuel et des époques inverses où la direction du champ magnétique est opposée. Chaque époque étant entrecoupée d'épisodes (ou événements) consistant en un court changement de polarité.
Image (modifiée) : www2.ggl.ulaval.ca
 
Échelle des inversions magnétiques (équipes américaine et australienne, 1960 à 1966)
Une datation précise des inversions magnétiques a été réalisée au début des années 1960 grâce à la radiochronologie (mesure du temps par étude de la désintégration d'isotopes radioactifs). On dénombre environ 300 inversions magnétiques au cours des derniers 200 millions d'années (la dernière inversion est survenue il y a 780 000 ans).
Image : d'après fr.wikipedia.org et Dictionnaire de géologie, Foucault Raoult, Dunod 2005
 
Anomalies magnétiques d'un secteur de la dorsale Atlantique au sud-ouest de l'Islande (Vine, Matthews et Molely, 1963)
Durant les années 1950 des magnétomètres embarqués à bord de navires ont permis de mesurer l'intensité du champ magnétique de la croûte océanique. On observe alors une alternance d'anomalies positives et négatives en "peau de zèbre", de part et d'autre de la dorsale. En effet l'aimantation des roches induit localement un champ magnétique, très faible mais mesurable, qui s'ajoute (anomalie normale) ou se retranche (anomalie inverse) au champ magnétique terrestre actuel. Vine, Matthews et Molely émettent l'hypothèse que les fonds océaniques se forment en permanence au niveau des dorsales, s'écartent symétriquement de part et d'autre de cette dorsale et disparaissent au niveau des fosses océaniques. C'est l'expansion des fonds océaniques déjà proposée par Hess. Il reste toutefois à vérifier que les roches sont plus âgées au fur et à mesure que l'on s'éloigne de la dorsale.
Image (modifiée) : Alain Gallien svt.ac-dijon.fr
Le "profil magnétique magique" (Walter Pittman, 1965)
Ce profil magnétique est enregistré sur 1000 km de part et d'autre de la dorsale de l'océan Pacifique (A). Si on inverse le profil par rapport à son point central, qui correspond l'axe de la dorsale (B), la symétrie des profils (A et B) est parfaite. Selon l'hypothèse de Vines et Matthews les laves épanchées au niveau de la dorsale acquièrent en se refroidissant l'aimantation ambiante de leur époque, alternativement positive et négative. Pittman a alors tracé le profil théorique (C) d'après l'échelle des inversions magnétiques, il observe que celui-ci correspond exactement aux profils (A et B) mesurés. Non seulement, de part et d'autre de la dorsale, la succession des bandes d'anomalies correspond à la succession des inversion magnétiques mais la largeur de chaque bande d'anomalie est proportionnelle à la durée entre deux inversions. Pour la première fois l'expansion océanique était vérifiée par des données de terrain. C'est ce document qui a fait basculer les derniers fixistes vers le mobilisme.
Source : Xavier Le Pichon dans La Recherche n° 153, mars 1984
  Exercice 3. Vitesse d'expansion océanique  
En utilisant les données du document ci-dessus, calculer la vitesse moyenne d'expansion de cette partie du Pacifique.
Correction
 
Anomalies magnétiques et expansion océanique (Vines et Matthews, 1966)
Vines et Matthews proposent un modèle explicatif de l'expansion océanique
Image (modifiée) : svt.ac-dijon.fr/schemassvt
     
III. Années 1960 : des données nouvelles valident l'hypothèse d'une expansion océanique

 
Les années 1930-1950 sont caractérisées par une absence de confrontation entre fixistes et mobilistes. Chez les partisans comme chez les négateurs, personne n'est vraiment enclin à rouvrir les discussions.
Les arguments de Wegener reposaient uniquement sur l'observation des continents car les fonds océaniques, qui représentent les deux tiers de la surface terrestre, étaient largement inexplorés dans les années 1920.
Pendant les années 1950-1960 le développement de l'océanographie (échosondeur, écoute sismique, détection magnétique, mesure des flux thermiques) permet de découvrir la topographie des fonds océaniques.
De la dorsale du Pacifique à celle de l'Atlantique
1. Une
dorsale de près de 65 000 km de long pour 500 à 1 500 km de large culmine vers 2,5 km de profondeur et domine les plaines abyssales dont la profondeur est d'environ 5 km.
2. Deux types de bordure continentale (marge continentale) :
- soit une fosse qui forme un sillon, de 8 à 11 km de profondeur pour 100 km de large, principalement en bordure de l'océan Pacifique ;
- soit
un plateau continental qui s'enfonce en pente douce jusqu'à 200 m de profondeur environ. La pente augmente ensuite rapidement et forme le talus continental qui rejoint la plaine abyssale.

Le flux de chaleur libéré par la Terre (flux géothermique) est plus élevé que la moyenne au niveau des dorsales. Cela est associé à des mouvements de convection manteliques ascendants au niveau des dorsales et descendants au niveau des fosses (où on observe un excès de gravité).

L'ensemble des observations océanographiques a permis de formuler l'hypothèse de l'expansion des fonds océaniques selon laquelle les océans se forment en permanence au niveau des dorsales, s'écartent symétriquement de part et d'autre de celles-ci avant de disparaître au niveau des fosses océaniques.

La mise en évidence de bandes d’anomalies magnétiques normales et inverses symétriques par rapport à l’axe des dorsales océaniques, corrélables avec les phénomènes d’inversion des pôles magnétiques, a permis de valider l'hypothèse de l'expansion des fonds océaniques et de calculer la vitesse d'expansion océanique (ou taux d'expansion océanique).
 
Quand une roche refroidit certains de ses minéraux s'aimantent vers 600 °C et acquièrent un champ magnétique de même direction que le champ magnétique terrestre du moment. Or la direction du champ magnétique terrestre s'est fréquemment inversée au cours du temps, ce qui ne change pas le champ magnétique des roches déjà acquis. Si le champ magnétique terrestre est de même sens que le champ magnétique d'une roche, les deux s'ajoutent (anomalie normale). Dans le cas contraire ils se soustraient (anomalie inverse).
   
BILAN

Depuis l'Antiquité il était admis par tous, comme une évidence, que les continents sont immobiles dans le plan horizontal, c'est le paradigme fixiste. Durant les années 1910 et 1920, en s'appuyant uniquement sur des arguments provenant des continents, les seuls disponibles à cette époque, Wegener n'a pu ni réfuter le fixisme ni valider l'hypothèse de la dérive des continents.

Dans les années 1960, c'est la découverte progressive des fonds océaniques, avec notamment l'interprétation des anomalies magnétiques, qui a permis la naissance d'un nouveau paradigme : le mobilisme.
   
 
Paradigme. Conception théorique dominante qui a cours à une certaine époque dans une communauté scientifique  (Dictionnaire « Le Robert »).
   
 
À méditer...

On ne comprendra rien à la Terre tant que l'on en étudiera que le tiers émergé disait Richard Field professeur à Princeton dans les années 1930 et qui eut pour élèves quelques uns des pères du mobilisme tels Maurice Ewing (Lamont), Harry Hess à (Princeton) et Edward Bullard (Cambridge).
Rapporté par Xavier Le Pichon, La Recherche n° 153, mars 1984

Début 1966, Xavier Le Pichon (chercheur Français au Lamont-Columbia) était parti en mission en mer puis présenta sa thèse de doctorat (fixiste) à Strasbourg en avril. Il ne rentra au laboratoire que début mai et découvrit aussitôt ce qu'il appelle lui même le "profil magnétique magique" de Walter Pittman. « Ma femme se souvient encore de mon retour du laboratoire, je lui demandai de me servir un whisky et lui déclarai : les conclusions de ma thèse sont fausses ; c'est Hess qui a raison ».
Xavier Le Pichon, La Recherche n° 153, mars 1984

« [...] une fois qu'elle a rang de paradigme, une théorie scientifique ne sera déclarée sans valeur que si une théorie concurrente est prête à prendre sa place.»
Thomas Samuel Kuhn, La Structure des révolutions scientifiques, Paris, Flammarion (Champs), 1983 [1962],
Chap. VII, « réponse à la crise »

« À notre époque, plus que de données inédites, d’instruments meilleurs ou de techniques nouvelles, les sciences de la Terre semblent avoir besoin de passer simplement de notre croyance actuelle (on est en 1968) en une structure statique du globe au concept nouveau suivant lequel il a longtemps été mobile. Cela est parallèle et semblable à la révolution copernicienne, et devrait peut-être être appelé la révolution wegenerienne, du nom de son principal artisan. »
John Tuzo Wilson, Proc. Amer. Phil. Soc., 112, 5, 1968

Une théorie, par essence, n’est jamais « démontrable », elle est seulement « falsifiable » (ou « réfutable »), c’est-à-dire que « le critère de la scientificité d’une théorie réside dans la possibilité de l’invalider, de la réfuter ou encore de la tester ».
Karl Popper, 1934
   
Pour en savoir plus

Revue

- La Recherche n° 153 mars 1984, La naissance de la tectonique des plaques, Xavier Le Pichon

Sitographie

- De la dérive des continents à la tectonique des plaques cbga.net
- De Wegener à la tectonique des plaques : sept fois sept ans de réflexion (Marcel Lemoine) annales.org
- La dérive des continents de Wegener planet-terre.ens-lyon.fr (niveau universitaire)
- La découverte de la convection manteliques planet-terre.ens-lyon.fr (niveau universitaire)
- La convection manteliques, moteur de la tectonique des plaques, si souvent évoquée, si souvent mal comprise planet-terre.ens-lyon.fr (niveau universitaire)
Correction de l'exercice 1
  Station OG08
Temps d'arrivée des ondes Pg = heure d'arrivée - heure de départ = 16 h 47 min 07,658 s - 16 h 46 min 57,649 s = 10,009 s
Vitesse des ondes Pg = distance épicentrale/temps d'arrivée = 58,6/10,009 = 5,8548 km.s-1
Station SSB
Temps d'arrivée des ondes Pg = heure d'arrivée - heure de départ = 16 h 47 min 16,344 s - 16 h 46 min 57,649 s = 18,695 s
Vitesse des ondes Pg = distance épicentrale/temps d'arrivée = 107/18,695 = 5,7235 km.s-1
Vitesse moyenne des ondes Pg = 5,8548 + 5,7235 / 2 = 5,79 km.s-1
Correction de l'exercice 2
  Méthode 1 : résultat approché où on néglige la profondeur focale h
Temps d'arrivée des ondes PMP t = heure d'arrivée - heure de départ = 3h 12min 18,540 s - 3h 12 min 4,493 s = 14,047 s
Distance parcourue par les ondes PMP d = V.t = 6,25 x 14,047 = 87,8 km
(d/2)2- (Δ/2)2 = 1926,9 - 1001,7 = 952,2 = H2
Profondeur du Moho H
= 30,4 km
  Méthode 2 : résultat exact
Retard des ondes PMP sur les ondes Pg = 2,96 s
Profondeur du Moho H = 32,1 km
Source et autre exemple : www2.ac-lyon.fr et pedagogie.ac-toulouse.fr
Correction de l'exercice 3
 
En première approximation : pour d = 500 km on a t = 11 Ma d'où v = 45,55 km.Ma-1soit environ 4,6 cm.an-1.
L'expansion étant symétrique de part d'autre de la dorsale, la vitesse moyenne d'expansion totale de 9,2 cm.an-1.