SVT - Première S
Chapitre 1.4
L'expression du phénotype
OBJECTIF

I. Le phénotype moléculaire varie
A. Des protéines différentes à la suite d'une mutation
B. Des protéines différentes en fonction du temps
C. Des protéines différentes sous l'influence de facteurs internes
      TP1. Stress et cortisol
D. Des protéines différentes en fonction de l'environnement
L'essentiel

II. Du phénotype moléculaire au phénotype macroscopique 
     
TP2. La drépanocytose.
A. Le phénotype s'exprime d'abord à l'échelle moléculaire
B. Le phénotype moléculaire induit le phénoype cellulaire
C. Le phénotype cellulaire induit le phénotype macroscopique
L'essentiel

BILAN

 
Séparation des protéines de deux types cellulaires différents
Les protéines retrouvées dans les deux électrophorèses bidimentionnelles sont repérées en rouge, celles présentes dans une seule en bleu. Toutes les cellules n'expriment pas les mêmes protéines alors que leur information génétique est la même.
Image : SVT 1S, Nathan 2011 p. 69 fig. 3
 
L'électrophorèse bidimensionnelle est une technique de laboratoire permettant de séparer les protéines d'un mélange selon un double gradient. On travaille en deux temps :
1. l'extrait cellulaire est placé sur un gel qui supporte un gradient de pH (entre pH 3 et pH10 par exemple). Chaque protéine migre alors rapidement dans le gel jusqu'à atteindre une zone où sa charge devient nulle (pont isoélectrique) ;
2. on crée un gradient électrique perpendiculairement au gradient de pH, les protéines migrent alors en fonction de leur poids moléculaire.
 
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1 Granulocytes et hématies - 2 Muscle strié - 3 Neurone (cellule nerveuse) - 4 Muqueuse intestinale (CT de glandes de Lieberkühn)
L’organisme humain est constitué de 250 types cellulaires différents. Selon les protéines qu'ils expriment les différents types cellulaires assurent des fonctions différentes.
Images : 1 webapps.fundp.ac.be - 2 webapps.fundp.ac.be - 3 webapps.fundp.ac.be - 4 webapps.fundp.ac.be
 
Le bronzage
La coloration de la peau est due à la synthèse d'un pigment, la mélanine, qui nécessite l'intervention de protéines enzymatiques dont la production est modulée par les rayons ultraviolets du Soleil. Si le génome est assez stable à l'échelle de quelques générations, le protéome d'un individu varie en permanence, de sorte qu'à un instant donné, une cellule donnée n'exprime qu'1 à 2% de son information génétique.
Image : 1 SVT 2e, Hachette 2010, p. 38
     
OBJECTIF

On appelle génotype l'ensemble (ou une partie seulement) de l'information génétique portée par un indvidu (c'est à dire la nature des allèles qu'il porte pour chacun des gènes de l'espèce).

On appelle phénotype l'expression individuelle, et à un moment donné, des caractères héréditaires de l'espèce transmis par l'information génétique portée par l'ADN.

Toutes les cellules d'un organisme pluricellulaire possèdent la même information génétique car elles sont issues d'une même cellule œuf par reproduction conforme. Elles ont pourtant un aspect différent et ont des fonctions différentes. De plus, le phénotype d'un individu peut varier au cours du temps alors que son information génétique est assez stable.

On recherche comment l'expression de l'information génétique peut être modulée et comment elle s'exprime à l'échelle macroscopique.

   
I. Le phénotype moléculaire varie
I.A. Des protéines différentes à la suite d'une mutation allélique
Conséquences de mutations du gène de la bêtaglobine sur le phénotype moléculaire
Mutation silencieuse (betavar) : le triplet mutant (CAT) est synonyme du triplet antérieur (CAC) du fait de la dégénérescence du code génétique (ils codent tous deux l'histidine). C'est souvent le cas pour les modifications affectant la troisième base d'un triplet. La mutation est donc sans effet.
Mutation faux sens (drepcod) : le triplet mutant (GTG) code un acide aminé différent (valine) du triplet antérieur (GAG qui code l'acide glutamique) ce qui entraîne une modification de la séquence du polypeptide et peut provoquer une modification de ses propriétés. S'il n'y a pas de modification de propriétés on parle de mutation neutre.
 
Mutation non-sens (tha1cod) : le triplet mutant (TAG) correspond (ou ne correspond plus) à un codon stop. La traduction est alors interrompue prématurément (ou poursuivie au delà de la normale). La mutation provoque une chaîne polypeptidique incomplète (ou trop longue) généralement non fonctionnelle.
La substitution ne modifie pas le nombre de nucléotides donc le cadre de lecture n'est pas affecté. Par contre insertion et délétion (tha4cod) modifient le cadre de lecture quand le nombre de nucléotides affectés n'est pas un multiple de trois. Dans ce cas tout le codage est affecté en aval de la mutation.
 
On appelle codon un groupe de trois nucléotides d'ARN (ribonucléotides) et triplet un groupe de trois nucléotides d'ADN (désoxyribonucléotides).
I.B. Des protéines différentes à cause de facteurs internes agissant en fonction du temps
 
Les globines humaines en fonction de l'âge
Ces différentes globines sont codées par des gènes différents portés soit par le chromosome 11 (globines bêta, delta, epsilon et gamma A) soit par le chromosome 16 (globines alpha et zêta).
Elles forment essentiellement trois types d’hémoglobines fonctionnelles au cours de la vie :
- l’hémoglobine E (embryonnaire) = 2 chaînes zéta + 2 chaînes epsilon ;
- l’hémoglobine F (fœtale) = 2 chaînes alpha + 2 chaînes gamma  ;
- l’hémoglobine A (après la naissance) = 2 chaînes alpha + 2 chaînes bêta.
Au cours du temps, ce ne sont pas toujours les mêmes gènes qui s'expriment chez un même individu.
Image (modifiée) : Nathan TS 2002 p. 78
I.C. Des protéines différentes sous l'influence de facteurs internes permettant la différenciation cellulaire
 
Différenciation des cellules sanguines
Après la naissance, des cellules souches de la lignée somatique, situées dans la moelle rouge des os, se divisent activement en donnant de nouvelles cellules souches et des cellules qui se différencient en cellules sanguines. Celles-ci contiennent des protéines communes et des protéines spécifiques. Elles reçoivent en effet des signaux chimiques qui stimulent leur multiplication et leur différenciation. Dans le cas des hématies il s'agit d'interleukines (IL1, IL4, IL6), du GM-CSF, qui agisssent aussi sur d'autres cellules et de l'érythropoïétine ou EPO (qui est une hormone) ainsi que de la protéine GATA-1 qui agissent spécifiquement sur la lignée cellulaire produisant des hématies .
Source : F. Galland biologie.univ-mrs.fr - Images : webapps.fundp.ac.be et www2.teknat.uu.se
 
Dosage des ARNm du gène GATA-1 et de la bêtaglobine au cours de la différenciation des hématies
- Le blocage du fonctionnement du gène GATA-1 inhibe la formation des hématies.
- L'étude de la structure de la protéine GATA-1 montre qu'elle est capable de se fixer sur l'ADN et en particulier à proximité du gène de la bêtaglobine qu'elle active.
Image : SVT 1S, Nathan 201, p69 fig. 4b
 
Séquence des trente premiers acides aminés de quelques protéines des cellules sanguines
Les protéines spécifiques des différents types de cellules sanguines ont des séquences spécifiques d'acides aminés. Elles sont donc codées par des gènes différents. Il en résulte que les différents types de cellules n'expriment pas les mêmes gènes.
Traitement obtenu avec le logiciel Rastop
 
Toutes les cellules d'un individu sont issues d’une cellule-œuf par mitoses successives (reproduction conforme), elles contiennent donc les mêmes gènes. Pourtant, dans l'espèce humaine, suite à la différenciation cellulaire, on compte 250 types cellulaires d'acpect différent, qui assurent des fonctions différentes et qui produisent des protéines différentes. Ils n'expriment donc pas les même gènes.
I.D. Des protéines différentes en fonction des variations de l'environnement
  Exemple 1
TP 1. Stress et cortisol
 
Un effet du stress
Le cortisol est une hormone sécrétée lors d'un stress par une glande située au dessus du rein (la corticosurrénale) qui est sous la dépendance du système nerveux lui-même en relation avec l’environnement extérieur. Dès qu’il a franchi la membrane plasmique d’une cellule cible le cortisol s’associe à un récepteur cytoplasmique. Le complexe hormone-récepteur migre alors dans le noyau où se lie à l’ADN près de gènes cibles et ainsi active ou ralentit la transcription. Par exemple, dans les cellules du foie, il active en particulier la transcription des gènes codant la synthèse des enzymes nécessaires à la libération de glucose qui est un métabolite énergétique.
 
On appelle stress l'ensemble des réponses d'un organisme soumis à des facteurs environnementaux qui imposent des contraintes. Un exercice physique fait intervenir des réponses semblables à celles d'un stress.
 
Exemple 2
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1 Quantité de dioxygène en fonction de l'altitude - 2 Érythropoïétine plasmatique et séjour en altitude - 3 Hémoglobine et séjour en altitude
En altitude, la baisse de la pression partielle en dioxygène (1) provoque un manque chronique* de dioxygène qui stimule des récepteurs spécifiques situés dans les reins. Cela entraîne une libération d'EPO par les cellules endocrines du rein (2). Cette production est maximale entre 24 et 48 heures après l’arrivée en altitude, d’où l’intérêt d’une bonne acclimatation, puis régresse sur 3 semaines. À son tour, l'EPO agit sur les cellules de la moelle rouge des os en provoquant une augmentation de la production d'hémoglobine et d'hématies (3). C’est pour cela que l’on se sent plus en forme au retour à une altitude plus basse. On a donc un facteur externe (le manque de dioxygène) qui déclenche un facteur interne (l'érythropoïétine) qui déclenche enfin l'activité du gène de la bêtaglobine.
* Si le manque de dioxygène est passager (effort), des récepteurs à O2 carotidiens entraînent simplement une augmentation passagère de la fréquence ventilatoire (voir cours de seconde chapitre 3.1).
Images : 1 www.lesiteayvon.com - 2 fr.biolaster.com - 3 campusport.univ-lille2.fr
 
Production d'hémoglobine consécutive à des injections d'EPO
L’EPO, ou érythropoïétine, est une hormone qui est produite par les reins (à 85 %, le reste étant produit par le foie). Déversée dans le sang, elle est ensuite reconnue par des récepteurs de la surface des érythroblastes (précurseurs des globules rouges) de la moelle osseuse. Plus la quantité d'EPO est importante, plus la production d'hémoglobine est élevée.
 
Mode d'action cellulaire de l'EPO
La fixation de l'EPO sur les récepteurs de surface des cellules cibles active un second messager intracellulaire (M2). Celui-ci migre dans le noyau et se fixe alors au niveau de séquences spécifiques des régions promotrices de différents gènes cibles. Cela permet l’activation de la transcription de gènes intervenant dans la prolifération et la différenciation des érythroblastes (cellules en cours de différenciation en hématie) en général et de l'hémoglobine en particulier.
Source : www.jle.com/e-doc
I. Le phénotype moléculaire varie

L'ensemble des protéines qui se trouvent dans une cellule constitue son phénotype moléculaire.

Une mutation allélique peut être à l'origine d'une protéine différente ou de l'absence d'une protéine.

L’activité d’un gène peut être modulée (activation ou inactivation) par des facteurs émanant de l'organisme lui-même (facteurs internes) ou de l'environnement (facteurs externes), on parle de facteurs épigénétiques.
  • Les gènes de développement sont des gènes sélecteurs dont l’activité contrôle celle d’autres gènes en fonction de la position de la cellule dans l’organisme et/ou du moment (ex. la nature de l'hémoglobine varie en fonction du temps ou la différenciation cellulaire). Ce mécanisme permet notamment la différenciation cellulaire aboutissant à des cellules spécialisées dans une fonction donnée.
  • L’environnement peut activer des signaux moléculaires qui modulent la protéosynthèse (ex. production d'enzymes permettant la libération de glucose lors du stress ou la production d'EPO permettant la synthèse de bêtaglobine). Selon l'environnement, ce ne sont donc pas toujours les mêmes gènes qui s'expriment dans une même cellule. Cela permet une adaptation rapide à des variations des conditions de milieu.
  • Quand les facteurs de l’environnement combinent leurs effets à ceux d’allèles de prédisposition (ou allèles de susceptibilité) on peut observer le développement de certaines maladies (diabète de type 2, certains cancers, maladies cardio-vasculaires… voir chapitre 3.3).
Le protéome, qui est l'ensemble des protéines codées par le génome, varie donc dans le temps, dans l'espace (selon les cellules) et selon l'environnement.
   
II. Du phénotype moléculaire au phénotype macroscopique
TP 2. La drépanocytose + Documents de référence
II.A. Le phénotype s'exprime d'abord à l'échelle moléculaire
Un phénotype moléculaire : l'hémoglobine
 
Deux molécules d’hémoglobine A (squelette carboné)
L’acide glutamique, en position 6 des chaînes bêta, est représenté en sphères. Les acides aminés situés à la périphérie de la molécule sont hydrophiles ce qui permet la liaison avec les molécules d’eau environnantes. L’hémoglobine A (HbA) est ainsi soluble dans l'eau du cytoplasme des globules rouges.
Image obtenue avec le logiciel Rastop
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1. Deux molécules d’hémoglobine S - 2 Polymérisation de l'hémoglobine S - 3. Hémoglobine S cristallisée (modélisation) - 4 Détail d'une fibre d'hémoglobine S cristallisée (MET) - 5. Fibres d’hémoglobines S dans une hématie (MET x 6500) certaines fibres d'HbS sont en dehors de la cellule (flèches).
Suite à une mutation (voir drepcod ou ci-dessus), l’acide glutamique qui est hydrophile, situé en position 6, est remplacé par la valine qui est hydrophobe. Dans le sang veineux, appauvri en dioxygène, cela provoque la formation de liaisons hydrophobes entre les molécules d’hémoglobine S (HbS) voisines (1 et 2). En se liant les unes aux autres les molécules d’HbS forment des fibres rigides, longues de 10 à 15 µm (3, 4), qui s'accumulent, déforment et fragilisent l'hématie (5).
Images : 1 obtenue avec le logiciel Rastop - 2 fr.wikipedia.org - 3 www.inrp.fr - 4 SVT 1S, Bordas 2011 p. 79
 
L’hémoglobine est une molécule, contenue dans les globules rouges du sang ou hématies, qui a la propriété de se combiner rapidement, et de façon réversible, au dioxygène. Cela lui permet d’assurer le transport du dioxygène entre les alvéoles pulmonaires et les cellules.
II.B. Le phénotype moléculaire induit le phénoype cellulaire
Un phénotype cellulaire : les hématies
 
Hématies et circulation capillaire
Les hématies qui contiennent de l’hémoglobine A (2 images de gauche) sont biconcaves et ont un diamètre de 7 µm. L'HbA étant soluble, les hématies se déforment facilement et peuvent circuler dans les plus petits capillaires, dont le diamètre (4 µm) est inférieur au leur.
Les hématies qui contiennent de l'hémoglobine S (2 images de droite) sont falciformes (en faucille ou en croissant). En effet, les fibres d’HbS déforment les hématies et les rendent rigides et fragiles. Celles-ci ne peuvent plus circuler dans les plus petits capillaires et sont détruites en excès.
Image : www.inserm.fr U124 (Inserm/Féo, Claude) et www.mydochub.com
Images de circulation capillaire (pie mère d'encéphale de porc) : www.pedagogie.ac-nantes.fr (ressource principale )
II.C. Le phénotype cellulaire induit le phénotype macroscopique
Un phénotype macroscopique : la drépanocytose
  Radiographie de la main
L'altération de la circulation sanguine dans les os provoque une irrégularité de la croissance des doigts.
Image SVT 1S, Belin 2011p. 58 fig 2
 
Les symptômes de la drépanocytose
La présence d'hématies falciformes dans le sang provoque un ensemble de troubles : la drépanocytose (du grec drepnos, faucille). C'est une maladie héréditaire liée à la présence d'hématies falciformes. Elle est particulièrement fréquente dans les populations d'origine africaine subsaharienne, des Antilles, d'Inde, du Moyen-Orient et du bassin méditerranéen. C'est la première maladie génétique en France (3000 cas), et probablement dans le monde (50 millions d'individus atteints).
     
II. Du phénotype moléculaire au phénotype macroscopique 

Le phénotype moléculaire conditionne la structure des cellules et détermine leur activité biologique. Il impose le phénotype cellulaire.

Le phénotype cellulaire contrôle la morphologie (organisation externe), l’anatomie (organisation interne) et la physiologie (fonctionnement) d’un individu c'est-à-dire le phénotype macroscopique.

Les différents niveaux de phénotypes sont liés.
   

BILAN

Les cellules d'un individu sont issues d’une cellule-œuf par mitoses successives (reproduction conforme), elles contiennent donc la même information génétique (à l'exception de nos gamètes). Cependant, outre les mutations, elles sont soumises à divers facteurs épigénétiques et n'expriment pas toutes les mêmes gènes. Cela permet la différenciation cellulaire, d'une part, et les variations d'activité d'une même cellule, d'autre part.

Le phénotype macroscopique dépend du phénotype cellulaire, lui même induit par le phénotype moléculaire.

 

Pour en savoir plus

Sitographie
epigenome.eu/fr Site scientifique consacré à l'épigénétique
www.inserm.fr Dossiers d'information sur l'épigénétique et la drépanocytose
www.orpha.net Nombreuses données sur la drépanocytose
www.drepan-hope.com Site consacré à la drépanocytose